Peter May – La trilogie écossaise.
Quand j’étais gamin, de temps en temps, j’allais acheter le magazine « Grands Reportages » chez la marchande de journaux. « Grands reportages », c’était un peu comme « Géo », sauf que la couverture n’était pas verte. Il y avait dans ce magazine, une rubrique que j’adorais plus que les autres. « Terres oubliées ». Tout était dans le titre. On y parlait de micro régions, perdues à des milliers de kilomètres de capitales inconnues.
Un jour, c’était l’été, on avait mis nos bonnets. On se baladait sur le port d’Ullapool, au nord-ouest de l’Ecosse. Le chien qu’on voyait jouer entre les chalutiers était en fait un phoque. A chacun ses animaux de compagnie…Soudain un gros ferry était venu fendre les eaux du fjord. On avait regardé les passagers débarquer, des gueules taillées à la serpe, en T-shirt. Il y avait aussi ceux qui paraissaient frigorifiés dans leurs combinaisons polaires. Des touristes. Le ferry venait de Stornoway, la capitale des Hébrides extérieures. Lewis et Harris, deux îles perdues au large, détachées de la mère Ecosse. 2179 km2 balayés par les tempêtes de l’Atlantique nord et les vents violents. 9 habitants au kilomètre carré. Le paradis.
C’est là-bas que Peter May a choisi de situer sa trilogie. Des enquêtes policières menées par l’inspecteur Fin McLeod, un petit gars du coin qui a vécu toute son enfance sur l’île, avant de fuir à Glasgow à la fin de l’adolescence.
C’est un meurtre qui le ramène là-bas et lui fait revivre son enfance. McLeod vient de perdre son fils de huit ans, renversé par un chauffard et s’apprête à quitter sa femme. Il arrive sur l’île, tête basse, épaules tombantes, en quête de fantômes qu’il aurait voulu oublier. Sur les traces de l’assassin, il retrouve des gens qu’il a quittés vingt ans plus tôt sans vraiment leur dire adieu.
Romans policiers contemplatifs, où l’intrigue fait souvent place à l’observation des rapports amicaux, présents ou passés, à la nostalgie, au décor. Trois enquêtes qui sont autant de retours sur le passé. Une ambiance écossaise où se mêlent nuages noirs, odeur de tourbe, alcool et déprime, vies gâchées ou retrouvées. Beaucoup de finesse, des personnages attachants, parfois malgré eux, des paysages hallucinants et la dureté de la vie insulaire, qui ne laisse rien passer. Car contrairement à ce qu’on pourrait penser à priori, il est beaucoup plus facile de se cacher dans une grande ville comme Glasgow que dans le désert des îles Hébrides.
Fin McLeod ou le retour à la tourbe. Un must absolu !
Peter May, « L’île des chasseurs d’oiseaux », « L’homme de Lewis », « Le braconnier du lac perdu » , éditions du Rouergue.