At 14, when your football team is going well, life is going well.
La Coupe du Monde a débuté hier soir. M. Darty a vendu plein de télé neuves, Fred, le sosie auriverde de Francis Perrin est déjà en lice pour l’oscar du meilleur acteur, le Brésil fait semblant d’être heureux, et dimanche soir, la France, si elle bat le Honduras (comme dit mon fils, c’est quoi ça ?), laissera de côté sa morosité et ses soucis. Copé embrassera Fillon et Benguigui, Le Pen.
Je fais semblant de cracher dans la soupe mais ma culture est sportive et mes premiers livres (je fais exprès d’oublier la Bible illustrée reçue avant même ma première communion), relataient les exploits des meilleures équipes de la fin des années 70. Je ne mentionne même pas les albums Panini, éternelles et irremplaçables Madeleines de Proust.
Bref, j’ai grandi avec un ballon dans la tête. Du plus loin que me revienne – Non Barbara ne jouait pas au foot- j’ai toujours été supporter du SCO d’Angers. Que voulez-vous, on ne choisit pas ses amours. Le SCO d’Angers, quand j’étais tout petit, était une équipe respectable de milieu de tableau de D1. A peine avais-je signé ma première licence à l’ Avant-garde de Champigné, que le SCO regardait déjà dangereusement vers le bas du classement. Un ou deux matches plus tard, à Jean Bouin , en plein hiver, assis sur des tribunes en béton surgelé, je regardais dépité, le SCO entrer dans une ère glaciaire, un purgatoire sportif, anonyme et ingrat, la D2.
Lassitude, découragement, honte, rien n’y faisait, j’aimais le SCO d’Angers, contre vents et marées.
Et puis, en 1992, le miracle s’est produit, le SCO est remonté en D1. Une année en pleine lumière, de glorieux espoirs, une victoire précoce et prestigieuse contre Lyon et puis le trou noir, les défaites à domicile, plus humiliantes contre Le havre que contre Marseille, le bas du classement, la dernière place, la honte quand même. Oui, je sais ce que c’est de supporter une équipe moyenne (euphémisme obligatoire pour éviter déprimes et remises en causes dangereuses).
The Bromley boys, c’est l’histoire vraie d’un gamin de la banlieue de Londres qui supporte la pire des équipes. Bromley FC. On est en 1969, son équipe évolue aux portes, seulement aux portes, du professionnalisme et Dave Roberts, une à deux fois par semaine, prend sa place dans les petites tribunes de Hayes Lane pour encourager son équipe. C’est l’histoire d’une saison au-delà du pathétique, une saison que Bromley traversera comme un fantôme, prenant la dernière place d’un classement anecdotique. Trois victoires, quatre matches nuls, 31 défaites, 111 buts encaissés, autant de gifles que le gamin vivra comme un chemin de croix (oui le foot est une religion Outre-Manche), un passage vers la fin de l’enfance :
There comes a time in just about every boy’s life when he realizes he’s simply not going to be good enough to play football professionally.
Un récit hilarant du football des champs, une photographie de l’Angleterre aussi, des banlieues populaires du sud de Londres et de la vie d’un gamin de quatorze ans, qui défend son club foireux comme s’il était un membre de sa famille.
Un épisode : Troisième match de la saison. Bromley a déjà perdu les deux premiers et encaissé neuf buts. Dave s’est fait faire un T.Shirt « Ellis must go », réclamant le départ de l’entraineur. Assis dans la tribune, il compte bien le dévoiler dès que son équipe encaissera le premier but. Une protestation spectaculaire à la hauteur de sa déception. Mais il fait chaud dans le stade et il se dit qu’il ne pourra peut-être pas attendre le premier but adverse pour retirer son anorak. Soudain, le pire se produit. L’entraineur, Ellis, vient s’assoir à côté de lui dans la tribune. Dave n’ose pas enlever sa grosse parka et la sueur coule dans son cou alors que les buts s’enchainent les uns après les autres, le gamin devenant de plus en plus rouge au fil de la partie. Ridicule et jouissif.
The Bromley boys est le récit super drôle de nos enfances de garçons. Quand j’étais gamin, tout était tellement important…Le SCO ne gagnait pas mais c’était le SCO. Et puis il y avait Laval, les voisins. Eux, ils étaient meilleurs. En 1983, ils ont même joué la coupe d’Europe. C’est passé sur TF1. A l’aller, en Autriche, ils avaient perdu 2-0 contre l’Austria de Vienne. Exploit obligatoire. Au retour, à Laval, ils menaient déjà 3-0 à la mi-temps, grâce à une reprise de volée spectaculaire d’Eric Stéphanini. Ils se sont fait rattraper ensuite et on n’a plus jamais entendu parler de Laval mais je peux affirmer que ce moment précis est un des meilleurs de mon enfance. The Bromley Boys parvint à faire vibrer cette petite corde liée à l’enfance et nous replonge dans l’intensité de ces années.
Un petit coup de nostalgie du temps de l’insouciance. Je ne suis pas loin de verser ma petite larme.
3 réponses à “The Bromley Boys – Dave Roberts”
Excellent ! 🙂
Et il est énorme ce but !
J’en pleure encore…