Avant l’arrivée des corbeaux nous avions la magie, l’Orenda. Nous n’en avions jamais douté avant que leurs serres n’agrippent pour la première fois nos branches et que leurs becs ne picorent pour la première fois notre terre.
L’effet McDo. Je viens de dévorer ce page turner, comme on engloutit un menu Big Mac en quelques minutes. Dès les premières pages de Dans le grand cercle du monde (Titre malheureux, traduction lourdingue et insipide de the Orenda) j’ai compris que je ne m’étais pas attaqué à un roman aussi exigeant que ceux qui m’attendent déjà sur l’étagère de mon bureau, ceux de la rentrée littéraire dont certains (la plupart ?) feront passer la langue, parfois pointue, avant le scénario. Non, le pavé que je tenais entre les mains réunissait manifestement tous les atouts vantés par les livres XO « Lire pour le plaisir ».
Une saga qui rejoint la grande Histoire, trois voix pour un même destin, celui de mort d’une tribu indienne, les Wendats, peuple Huron qui finira par se faire massacrer et exterminer par les Iroquois en 1640 dans le silence des forêts Ontariennes.
Trois personnages, un chef Huron, Oiseau, figure paternelle incarnant le courage et le poids de l’héritage, sa fille adoptive Chute de neige, et le Père Christophe, un Jésuite en mission.
Un roman d’action, dense et lent malgré tout comme les saisons qui passent au gré des maladies, des récoltes, des massacres et des nombreuses tortures infligées aux ennemis Iroquois. Le roman est d’ailleurs d’une cruauté parfois hallucinante (pages entières dédiées à la description des tortures par le menu…), mais il possède l’extraordinaire pouvoir des Best-sellers, celui qui vous fait tourner les pages encore et encore, qui vous fait vibrer et frissonner malgré vous pour des héros auxquels vous avez fini par vous attacher après six cents pages. Il y a un côté fascinant dans ce bouquin, pour qui a parcouru certaines de ces forêts situées quelque part en Ontario près des rives du lac Huron et même si les personnages sont parfois un peu caricaturaux, si la traduction est plutôt mauvaise (assez rare pour le souligner ) et si le style est basique, on est fasciné par cette reconstitution historique où l’esprit, les croyances, l’importance de l’âme, du passé et de l’identité sont au centre de tout. Les Jésuites nous semblent ridicules, évangélistes illuminés dans la nature, soldats éclaireurs, dont la véritable mission consiste à soumettre les peuples aborigènes au pouvoir de l’homme blanc qui lui apporte le salut supposé de l’âme à travers la Communion.
C’est donc la mort d’un peuple que Joseph Boyden nous conte dans ce long roman attachant. Une histoire des origines du Canada, pays au capital sympathie immense, que le monde entier aime opposer à son méchant (si,si) voisin, mais qui n’a pas toujours su cohabiter avec ceux qu’ils appellent « First Nations ». Une réflexion sur l’Eglise et ses travers, sur son utilité politique et culturelle qui rappelle évidemment le film Mission de Roland Joffé…Mais sans Ennio Morricone.
Dans le grand cercle du monde, Joseph Boyden, éditions Albin Michel
3 réponses à “Dans le grand cercle du monde – Joseph Boyden”
J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de livres sur les origines indiennes des nord américains, ou alors on nous les traduits plus… Ceci dit, le précédent roman de Joseph Boyden, avec des Indiens dedans également, n’était pas du tout à mes yeux un page turner et m’avait pas mal ennuyée…
A lire également, les deux précédents romans de cet incontournable auteur ! Si certaines thématiques sont récurrentes, chacun de ses livres est bien différent des autres et tous sont aussi puissants.
Bonsoir Charlotte,
Oui j’ai cru comprendre que l’identité indienne était toujours très présente et qu’on pouvait presque lire « Dans le grande cercle du monde » comme un prequel des précédents.