Joblard – L’hygiène de la vermine – Jean-Marc Royon

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Les piliers de bistrot, y a rien de pire pour un loufiat. C’est bâtard comme relation. Un habitué, c’est pas vraiment un ami et plus tout à fait un client. Une figure imposée dont l’omniprésence rappelle au barman que, malgré toutes les illusions qu’il peut avoir sur lui-même, il n’est rien de mieux en ce bas monde qu’un larbin à poivrots.

Le retour improbable de Joblard, le plus beau des poivrots parigots, pilier de bar des hauteurs de Paname, qui, depuis qu’il s’est fait virer de son boulot de technicien au théâtre Magador et dégager par « la Chôse », amour de sa vie, écume les bars à la marge de la cloche et se termine au litron à étoiles en compagnie de ses amis à la gouaille chargée, collection de foies douteux et d’haleines agressives.

Jean Louis Neuheur, enfance prolo pourrie, père alcolo à la main leste, rêve de fortune aux « Stazunis ». Une vie de Tony Montana des faubourgs extérieurs qu’il vivrait main dans la main avec son amour de toujours l’actrice porno américaine Mackenzee, avec laquelle il entretient une relation suivie bien qu’à sens unique à travers sa collection de films…Jean- Louis qui a des tendances poujado-faf, ouvre une pizzeria rue de Malte et s’imagine déjà en Don Corleone de la calzone. Oui mais voilà, les sans-abris du quartier ont une fâcheuse tendance à venir traînailler dans le quartier, ça pullule comme des rats, ça fait du tort à la pizza. Alors Monsieur Jean-Louis, qui n’est jamais à court d’idées, se met en tête de nettoyer la ville de tous ces parasites et met au point une version très personnelle de la mort aux rats.

Pour en finir mon garçon : les femmes. Avant de te faire enchrister pour la vie, fais d’abord un bon tour de piste. Moi, à part quelques tapins à droite à gauche, j’ai eu le temps de rien avant de me faire harponner par ta mère. Elle était enceinte de toi, c’est le grand regret de ma vie.

Joblard et ses amis qui passent leur vie à observer, moral et épaules basses, hygiène suspecte, poches sous les yeux, qui voient leurs camarades d’infortune tomber comme des mouches, relèvent un œil injecté de sang et soudain en alerte, se transforment en justiciers improbables prêts à défendre, bouteille à la main, les oubliés de la capitale.

Joblard, c’est jouissif. C’est de la gouaille à la San Antonio (cité), à la Audiard (cité aussi). C’est l’apologie de la médiocrité au service de l’humour, c’est de la poésie de comptoir aussi. J’avais adoré le premier épisode des aventures d’Etienne J, Joblard t’es le meilleur, d’où se dégageait une certaine mélancolie éthylique très touchante. Cet opus, moins contemplatif, plus rythmé, plus détaché de notre super-héros adopte un peu les codes du polar. Attention, on n’est pas non plus chez Vargas, ou chez Ellroy – la fin est quand même un peu rapide, voire un peu expédiée… Non, on est ailleurs, on plane à trois grammes, accoudés à un bar miteux et entourés de bonnes pâtes déchargées comme des vieilles piles et chargées au jaja du matin au soir.

Joblard, Vernon Subutex, c’est l’été la cloche. A vot’ bon cœur.

Voilà que déboule le grand Max, avec son pote qui a la gueule qu’il n’aurait dû avoir que dans quinze ans.

 

Joblard, l’hygiène de la vermine, Jean-Marc Royon, AAARG! éditions

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