La neige noire – Paul Lynch

9782226318138g

Des formes sombres et nébuleuses émergeant de l’étable, éclairées seulement par les flammes qui les dévoraient et les transformaient en silhouettes de cauchemar , plongées dans un étrange mutisme.

 

Sont malin chez Albin Michel. Ou alors je suis un peu con, je vous laisse choisir. Il a fallu qu’ils collent une photo sponsorisée par l’office du tourisme du Donegal sur la couverture du dernier Paul Lynch, pour que je me précipite. C’est faible et à ce tarif, j’aurais aussi bien fait d’acheter le Lonely Planet. Ils ont de jolies photos. Non, je n’ai pas lu la quatrième de couv’, je me suis laissé embarquer par la vague nostalgie d’un voyage récent au pays des collines vertes et de la pluie horizontale (le premier, conséquence de l’omniprésent second). L’Irlande, une deuxième patrie pour moi, j’ai renoncé à comprendre. Avouez au moins que la photo est belle, ça me rassurera.

Ça doit être la pluie, ou leur histoire récente –les cinq cents dernières années au moins – mais les irlandais respirent la tragédie misérable. Domination anglaise (on ne le souhaite à personne), famine, climat capricieux, terres non cultivables, et pire que tout, la religion catholique qui régule la vie jusqu’au fond des slips. La misère irlandaise est un cliché folklorique dont on a bien du mal à s’échapper.

Il n’y a que l’enfer ici.

J’ai d’abord cru, espéré, ça a duré une centaine de pages, avoir déniché un roman à la Ron Rash. Une ferme isolée, des regards qui se croisent, pas mal de descriptions, peu de dialogues. Une mise en scène de la lenteur et l’attente. On ne sait pas ce qui va se passer mais on le sent, c’est dans l’air, il y un drame qui se trame. Et puis, assez vite, la tragédie, dont on devine qu’elle sera la pivot de ce roman. Un incendie majeur qui va détruire ce que Barnabas avait tenté de construire à son retour de New York. On ne quitte pas impunément ces terres maudites. On n’y revient pas non plus en terrain conquis ou alors, la fatalité et le sort s’acharneront contre vous. Chronique un peu désespérée d’un désastre annoncé, La neige noire relate la lente agonie d’une famille qui cherche ses racines. Rien ne nous est épargné, jusqu’au dénouement final, le lecteur sera condamné à souffrir avec Barnabas et les siens qui finiront par se faire engloutir par ce monde gris, misérable et inerte, peuplé de fantômes résignés.

La neige noire est une fable misérabiliste d’un autre temps, à l’écriture chargée, un peu lyrique voire ampoulée, dont les thèmes mais seulement les thèmes, se rapprochent de l’univers de Ron Rash. Aucune ellipse, toutes les scènes sont jouées, rejouées, appuyées, vues sous plusieurs angles et surtout celui de la douleur, qui semble être le carburant essentiel de ce roman trop caricatural à mon goût mais qui saura tirer des torrents de larmes à ceux dont les glandes lacrymales réagissent à la simple évocation d’un mélo désespéré…

La neige noire, Paul Lynch, éditions Albin Michel

9 réponses à “La neige noire – Paul Lynch”

      • Et l’absence de pathos aussi ….et le côté ineluctable du recit….et son ecriture très touchante ….oui : je suis aussi une  » rash fan « …

  1. Restez donc avec Rash puisque vous ne savez pas apprécier la beauté de l’écriture de Lynch que ce soit celui-ci ou le premier.Tout le monde a le droit de s’exprimer,bien sûr, mais c’est dégueulasse de raconter des conneries sur un écrit d’une telle valeur tout cela parce que vous ne l’avez pas aimé.Rash n’est pas plus sobre que Lynch,s’envolant parfois dans des descriptions poétiques,sa première passion.La prose de Lynch est aussi louable.Si je comprends qu’on puisse ne pas aimer un bouquin,je ne vois pas l’intérêt de le salir de la sorte et en donner une image hautement fausse de mélo larmoyant.
    En fait,tous les reproches que vous faites à Lynch peuvent s’appliquer à Rash et sans vraiment beaucoup de mauvaise foi ou d’aveuglement.

    Par ailleurs,vous avez un paragraphe sur les malheurs de l’Irlande qui m’est apparu très familier quand je l’ai lu…Comme quoi,nos avis peuvent converger.

    Wollanup.

    • Et ben…me voilà rhabillé pour l’hiver ! Attention, ce n’est que mon avis ici et un avis très isolé au vu des autres critiques que j’ai pu lire. Oui, j’ai trouvé le livre trop insistant sur les misères successives et la fin, terrible m’a vraiment parue trop appuyée…Ce n’est que mon avis. Par ailleurs, j’ai repensé à ce que vous disiez sur Ron Rash et je serais assez d’accord avec vous pour ce qui concerne « Terres d’ombres ». Voilà, désolé de voir avoir offensé.

      • Je m’en veux de cette réaction épidermique…J’ai rencontré deux fois Lynch et il n’est pas à la recherche d’une imitation de Rash.J’adore l’homme (il dégage baucoup de charisme) mais je reste sur ma faim avec ces romans.Il poursuit son chemin…Dans »un ciel rouge le matin »,un irlandais fuyait vers l’Amérique et là,c’est le chemin inverse.C’est beau comme « grossir le ciel » de Frank Bouysse.Celui-ci a déjà d’ailleurs écrit qu’il voudrait rencontrer Lynch.c’est le terme de mélo larmoyant qui m’a explosé à la tronche.Je n’ai pas pleuré mais j’ai été gravement affecté par le roman.ceci dit,bien sûr,vous avez tout à fait le droit de l’écrire et nous sommes aussi,chez Unwalkers,souvent à contre -courant.Bonne continuation.
        Wollanup.

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