Oui, nous finissons tous par croire à nos petits mensonges.
Non, rien à voir avec l’actualité. Je n’ai pas décelé la moindre once d’anti-pénélopisme primaire chez Arnaud Dudek. Pas non plus d’anti-trumpisme malgré un titre qui rappelle méchamment les dernières dérives communicationnelles de l’équipe du peroxydé belliqueux. Rien à voir, bien au contraire. Arnaud Dudek nous entraîne loin de l’arrogante assurance des grands de ce monde, comme souvent, à chaque fois en fait, Arnaud Dudek s’attache à apprivoiser la faille, à la rendre charmante, touchante, d’autant plus touchante qu’elle est masculine.
Comment ne pas reconnaître chez Jules, ce jeune adulte à peine tombé du nid, à la recherche de sa sœur évaporée, le jeune homme en quête de lui-même et terriblement angoissé de devoir affronter le monde que nous (je, en fait…) avons été ? Deux ans qu’elle a disparu. Deux ans que Céline n’a plus donné de nouvelles. La police a cherché quelques temps puis tout s’est arrêté, la vie a continué et le vide a tout rempli.
Alors Jules, le sensible, le menteur compulsif, le gamin doué qui préfère déguiser la vérité plutôt que l’affronter, va plonger sans se dérober ou presque dans les mystères de Céline. En occupant son appartement, en remontant sa piste il va trouver. Alors oui, encore une fois, Arnaud Dudek touche au cœur des hommes, de ceux qui hésitent, qui ne sont pas prêts pour le grand saut, ceux qui ont peur de se tromper, qui bombent le torse en feignant l’assurance.
Une fille qui en a plus ou moins chassé une autre.
On le savait depuis Rester sage et les Fuyants, Arnaud Dudek est le porte-drapeau des hommes sensibles, un anti-Chuck Norris aux ambiances intimistes ultra-familières, qui susurre au creux de l’oreille des histoires auxquelles on ne peut que se raccrocher. Parce qu’on a été jeunes et hésitants, parce qu’on hésite encore, parce qu’on se plante, qu’on tombe parfois et qu’il y a toujours ce petit rien qui nous relève, les romans d’Arnaud Dudek sont des compagnons de route et de lutte, des trucs qui nous maintiennent droits, des tuteurs pour mâle sensible au parcours trébuchant. Essentiel.
Les vérités provisoires, Arnaud Dudek, Alma éditeur.
3 réponses à “Les vérités provisoires – Arnaud Dudek”
Je ne connaissais pas du tout cet auteur. Merci pour la découverte.
Fan…
[…] Un drôle de type, ce Jules Carenti. Doué d’une mémoire proprement prodigieuse, il est aussi menteur comme pas deux et un petit peu perdu dans la vie. Sa soeur ayant disparu depuis deux ans, il s’installe dans son appartement et arrête tout : il ne mange plus (sinon du thon en boite et des biscuits à la fraise, de loin en loin), dort à peine et ne va plus en cours. L’absence de Céline est un gouffre dont il mesure mal les contours. Mais la vie a ses façons de se faufiler même dans les plus grandes tristesses… Qui n’a pas encore fait connaissance avec la plume désinvolte d’Arnaud Dudek ferait un très bon choix en commençant par ce roman. Qui a lu « Rester sage » (mon préféré, et le premier), « Les fuyants » ou « Une plage au Pôle Nord » retrouvera ici un identique plaisir de lecture, le confort de se laisser prendre par la main par un auteur dont la tendresse et la bienveillance envers son histoire et ses personnages ne cesse de nous réconforter. Jolie surprise en plus avec un jeu typographique très réussi. Le billet d’Emmanuel. […]